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Comptes-rendus de lecture

Mohamed Mahiout, « Mémoires d’une grâce »

« La peine de mort est une défaite pour l’humanité »

par Ali Chibani

À l’occasion du 40e anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France, une série de concerts sera présentée au Panthéon le 26 octobre 2021. Le Chœur philharmonique, dirigé par Amine Kouider, fera entendre la célèbre déclaration de Robert Badinter « La peine de mort est une défaite pour l’humanité »  en lingala, en français, en russe, en espagnol, en japonais, en anglais, en arabe et en berbère.

Parmi les textes qui seront chantés, nous pouvons citer « Mémoires d’une grâce » écrit par le poète et photographe Mohamed Mahiout. Dans ce poème en trois langues (kabyle, arabe littéraire et français), l’auteur fait parler un condamné proche de « l’heure des comptes ». Poème mystique, « Mémoires d’une grâce » est formé de quatre strophes, deux en kabyle et deux en arabe, traduites en français par l’auteur lui-même. Cette traduction exploite le potentiel de la langue française, que l’on ne retrouve pas en kabyle ni en arabe. Aussi le texte français, bien qu’il s’origine dans les deux autres langues algériennes, se distingue des textes en arabe et en kabyle puisqu’il est donné dans une langue grammaticalement dépouillée. À  l’approche de la mort, on ne s’embarrasse pas du superflu de la langue : « Y a-t-il issue ?/ Giboulée et grêlons/ Ont de vigueur la hache ! »

Ce poème est aussi un voyage dans les cultures algériennes. Commençant par une évocation lyrique de la nature qui n’est pas sans nous faire penser à la poésie de Si Mohand Ou M’hand chez qui la métaphore du beau jardin spolié évoque l’Algérie sous l’emprise de la colonisation, « Mémoires d’une grâce » plonge ensuite dans la tradition du melhoun, poésie populaire arabophone très empreinte d’un esprit mystique.

À ce moment-là, le mysticisme du texte, offre la possibilité de changer de vision sur ce qu’est la mort. L’ « heure de vérité » se transforme en « voie de l’au-delà » où la « repentance » et la grâce sont possibles. Pour ce temps de « grâce », un poème suffit : « Le Clément te comble/ Et qui lui voue des rimes ».

Le condamné est dans sa cellule. Dans cet instant où le temps s’arrête mettant le condamné face à lui-même. Dans ce soliloque où il s’adresse à lui-même en usant de la deuxième personne, le condamné atteint  l’extase, cet au-delà du temps : « Banni soit le sanglot/ Le temps est communion/ Avec l’Unique qui en fait don ».

 Outre la beauté de ce texte offert en trois langues, ce sera la première fois que le Panthéon résonnera en kabyle et ce grâce à Mohamed Mahiout et au Chœur Philharmonique.

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