Le cri de la banalité
par Lama Serhan
Ahmed El Attar a enregistré des conversations téléphoniques qu’il a eues durant les années de révolution en Egypte. Avec comme titre de pièce On the importance of being an Arab, nous nous attendons donc à une définition de l’homme Arabe dans le monde post-révolutionnaire avec toutes les tensions que nous connaissons. Va-t-on assister alors à des débats entre le comédien et les différentes personnes qu’il a eues en ligne?
Sans filtre, Ahmed El Attar, nous révèle tout des conversations : les silences, les répétitions, les cris. Sur une musique orientale moderne populaire très forte, assis sur un bloc de béton, Ahmed El Attar revit complétement les conversations qu’il a eues. Lorsqu’il est nécessaire, des traductions défilent en dessous de lui, alors que sur un écran derrière lui des textes pornographiques mais aussi poétiques en anglais, français et arabe se succèdent.
Ce que cet homme nous raconte est aussi proche de nous que loin de ce que nous nous attendions : une porte à changer, un garçon qui va au foot, une dispute avec le père, une conversation avec son ex-femme. La vie, obstinément, dans sa banalité la plus exceptionnelle. Pourtant, dans la première conversation, nous entendons les mots : torture, Moubarak, panarabisme, Frères Musulmans. Alors quel sens prennent tous les « petits riens de la vie » après avoir entendu cela ? La banalité attachée à l’Histoire de son pays et du Caire, donne à chaque chose évoquée une autre tournure. Nous nous demandons même si la musique très forte, qui ne s’arrête pas de tout le spectacle, n’est pas aussi une façon de faire basculer ce son, qui appartient tellement au quotidien de la rue cairote, dans la violence de l’Histoire.
On the importance of being an Arab, pièce de l’Egyptien Ahmed El Attar, se joue au Tarmac jusqu’au 14 mars dans le cadre du festival (d)rôles de printemps.
Encore un superbe article, presser de lire le prochain !
Merci ! Et n’hésitez pas à aller voir le festival au Tarmac ! Bon week end